Today, we’re sharing a bit of a different article with you. It’s a book review published in The Guardian this summer about The Origin of Language by Madeleine Beekman. If you ever wanted to know when our ancestors started using language – and why – you might find this intriguing.
Aujourd’hui, nous partageons avec vous un article un peu différent. Il s’agit d’une critique de livre publiée cet été dans The Guardian à propos de The Origin of Language de Madeleine Beekman. Si vous vous êtes déjà demandé quand nos ancêtres ont commencé à utiliser le langage – et pourquoi –, cette lecture pourrait vous intriguer. (continuer en français ci-dessous)

The origins of our species’ exceptional communication skills constitute one of the more nebulous zones of the larger evolutionary narrative, because many of the bits of the human anatomy that allow us to communicate – notably the brain and the vocal tract – are soft and don’t fossilise. The linguistic societies of Paris and London even banned talk of evolution around 1870, and the subject only made a timid comeback about a century later. Plenty of theories have been tossed into the evidentiary void since then, and now evolutionary biologist Madeleine Beekman, of the University of Sydney, has turned her gaze on the problem.
Her theory, which she describes as having been hiding in plain sight, is compelling: language evolved in parallel with caring for our “underbaked” newborns, because looking after a creature as helpless as a human baby on the danger-filled plains of Africa required more than one pair of hands (and feet). It needed a group among whom the tasks of food-gathering, childcare and defence could be divided. A group means social life, which means communication.
The evidence to support Beekman’s theory isn’t entirely lacking, though a lot of it is, necessarily, circumstantial. We know that the compromise that natural selection hit upon to balance the competing anatomical demands of bipedalism and an ever-expanding brain was to have babies come out early – before that brain and its bony casing were fully formed.
One of the discoveries of the newly feminised wave of evolutionary science has been that alloparents – individuals other than the biological parents who contribute parenting services – played a critical role in ensuring the survival of those half-cooked human children. Another is that stone age women hunted alongside men. In the past it was assumed that hunting bands were exclusively male, and one theory held that language arose to allow them to cooperate. But childcare was another chore that called for cooperation, probably also between genders, and over years, not just hours or days.
Luckily, the reconfiguration of the head and neck required to accommodate the ballooning brain had a side-effect of remoulding the throat, giving our ancestors more precise control over their utterances. With the capacity to generate a large range of sounds came the ability to convey a large range of meanings. To begin with, this was useful for coordinating childcare, but as speech became more sophisticated, alloparents – particularly grandmothers – used it to transmit their accumulated knowledge, thereby nurturing infants who were even better equipped to survive. The result of this positive feedback loop was Homo sapiens, the sole survivor of a once diverse lineage.
Beekman takes her time before presenting this central idea; the book’s first half lays extensive groundwork, occasionally padded with tangential vignettes. But once she gets there, she makes some thought-provoking observations. Full-blown language probably emerged about 100,000 years ago, she thinks, but only in our line – not in those of our closest relatives. “We may have made babies with Neanderthals and Denisovans,” she writes, “but I don’t think we had much to talk about.”
And whereas others have argued that language must have predated Homo sapiens, because without it the older species Homo erectus couldn’t have crossed the forbidding Wallace Line – the deep-water channel that separates Asia and Australasia – she draws on her deep knowledge of social insects to show that communication as relatively unsophisticated as that of bees or ants could have done the job. Having made a persuasive case for the role of alloparents in the evolution of language, Beekman concludes that we did ourselves a disservice when we shrank our basic unit of organisation down from the extended to the nuclear family. Maybe, but historians including Peter Laslett have dated this important shift to the middle ages, long before the Industrial Revolution where she places it, and the damage isn’t obvious yet. Language is still being soaked up by young children; it’s still a vehicle for intergenerational learning. It may take a village to raise a child, but as Beekman herself hints, a village can be constituted in different ways.
Source: we adapted this article by Laura Spinney at The Guardian.
Il faut tout un village pour élever un enfant… voilà pourquoi nous avons commencé à nous parler.
Aujourd’hui, nous partageons avec vous un article un peu différent. Il s’agit d’une critique de livre publiée cet été dans The Guardian à propos de The Origin of Language de Madeleine Beekman. Si vous vous êtes déjà demandé quand nos ancêtres ont commencé à utiliser le langage – et pourquoi –, cette lecture pourrait vous intriguer.
Les origines des remarquables capacités de communication de notre espèce constituent l’une des zones les plus nébuleuses du récit évolutif, car une grande partie de l’anatomie humaine qui nous permet de communiquer – notamment le cerveau et le tractus vocal – est composée de tissus mous qui ne se fossilisent pas. Les sociétés linguistiques de Paris et de Londres ont d’ailleurs interdit toute discussion sur l’évolution vers 1870, et le sujet n’a timidement refait surface qu’un siècle plus tard. Depuis, de nombreuses théories ont été projetées dans ce vide de preuves, et aujourd’hui Madeleine Beekman, biologiste de l’évolution à l’Université de Sydney, a décidé de s’attaquer au problème.
Sa théorie, qu’elle décrit comme ayant été « cachée au grand jour », est convaincante : le langage aurait évolué en parallèle du soin apporté à nos nouveau-nés « pas encore tout à fait cuits », parce que s’occuper d’un bébé humain – une créature totalement démunie sur les plaines africaines remplies de dangers – nécessitait plus qu’une seule paire de mains (et de pieds). Il fallait un groupe capable de se répartir les tâches de cueillette, de garde d’enfants et de défense. Un groupe implique une vie sociale, et donc la nécessité de communiquer.
Les preuves à l’appui de la théorie de Beekman ne manquent pas totalement, même si beaucoup sont nécessairement circonstancielles. Nous savons que le compromis trouvé par la sélection naturelle pour concilier les exigences anatomiques concurrentes du bipédisme et d’un cerveau en constante expansion a été de faire naître les bébés plus tôt – avant que ce cerveau et sa boîte crânienne ne soient complètement formés.
L’une des découvertes de la nouvelle vague féminisée des sciences de l’évolution est que les alloparents – des individus autres que les parents biologiques qui contribuent aux soins – ont joué un rôle déterminant dans la survie de ces petits humains « à moitié cuits ». Une autre découverte est que les femmes de l’âge de pierre chassaient aux côtés des hommes. On pensait autrefois que les groupes de chasse étaient exclusivement masculins, et une théorie suggérait que le langage était né pour leur permettre de coopérer. Mais la garde d’enfants était elle aussi une tâche qui exigeait de la coopération, probablement également entre les genres, et sur des années, pas seulement quelques heures ou quelques jours.
Heureusement, la reconfiguration de la tête et du cou nécessaire pour accueillir ce cerveau en plein essor a eu pour effet secondaire de remodeler la gorge, donnant à nos ancêtres un contrôle plus précis de leurs émissions vocales. La capacité de produire une large gamme de sons a ouvert la voie à une large gamme de significations. Au début, cela servait à coordonner les soins aux enfants, mais à mesure que la parole se sophistiquait, les alloparents – et en particulier les grands-mères – l’ont utilisée pour transmettre leur savoir accumulé, permettant ainsi aux enfants de devenir mieux équipés pour survivre. Le résultat de ce cercle vertueux fut Homo sapiens, le seul survivant d’une lignée autrefois diverse.
Beekman prend son temps avant de présenter cette idée centrale ; la première moitié du livre pose un cadre approfondi, parfois étoffé de digressions anecdotiques. Mais une fois arrivée à son point, elle propose des observations stimulantes. Le langage pleinement développé serait apparu il y a environ 100 000 ans, estime-t-elle, mais uniquement dans notre lignée – pas chez nos plus proches cousins. « Nous avons peut-être fait des bébés avec les Néandertaliens et les Dénisoviens, écrit-elle, mais je ne pense pas que nous avions grand-chose à nous dire. »
Alors que certains soutiennent que le langage doit avoir précédé Homo sapiens, car sans lui l’espèce plus ancienne Homo erectus n’aurait pas pu franchir la redoutable ligne de Wallace – le chenal profond qui sépare l’Asie de l’Australasie –, Beekman s’appuie sur sa vaste connaissance des insectes sociaux pour montrer qu’une communication aussi peu sophistiquée que celle des abeilles ou des fourmis aurait pu suffire. Après avoir défendu de manière convaincante le rôle des alloparents dans l’évolution du langage, Beekman conclut que nous nous sommes desservis en réduisant notre unité de base, passée de la famille élargie à la famille nucléaire. Peut-être. Mais des historiens comme Peter Laslett ont daté ce changement majeur du Moyen Âge, bien avant la révolution industrielle où elle le situe, et les dégâts restent encore difficiles à déceler. Le langage continue d’être absorbé par les jeunes enfants ; il demeure un véhicule d’apprentissage intergénérationnel. Il faut peut-être tout un village pour élever un enfant, mais comme Beekman elle-même le suggère, un village peut prendre différentes formes.
Source: we adapted this article by Laura Spinney at The Guardian.
